Politique - Affaire Airbus. Le racket de la Justice

Philippe Brindet - 29.01.2020

De quoi s'agit-il ?

D'abord, essentiellement de ce que nous raconte la grosse presse. Nous n'avons pas tellement d'autre source. Pas de lanceur d'alertes qui ait publié les emails compromettant d'on ne sait quel obscur protagoniste de l'affaire ... On s'en passera donc.

Airbus, avionneur réputé, vend aussi des systèmes d'armes, à commencer par le A-400M destiné à remplacer le Transall en France.

Il y a quelques années, Airbus n'était pas un agent commercialement réputé dans ce domaine. La direction de Airbus - et donc très vraisemblablement les Etats français, allemand, britannique et espagnol qui sont parties prenantes dans la création et la marche d'Airbus - a donc décidé de mener des actions commerciales "agressives" pour acquérir des "parts de marché" d'un marché où il entrait. Ce qui signifie un certain nombre de tractations destinées à prendre le meilleur du marché indépendamment de la qualité des armements vendus et au détriment de concurrents.

La loi c'est la loi ...avec un six-coups ou sans!

A ce propos, dans ce marigot de brousse qui s'appelle la politique et le commerce internationaux, les Etats occidentaux se sont aperçus - avec l'horreur de Tartuffe - que le commerce des armes était "profondément immoral" ... Ils ont donc fait des lois coordonnées de sorte que, dès qu'on vend un canif nain, on est supposé demander des autorisations, obtenir des habilitations, payer des taxes sans fin. Le nombre de ces règles est tellement élevé que même si un opérateur s'est doté des moyens pour les respecter, un Etat a toujours moyen de faire jouer son droit de "faire respecter la loi". Au suspect de se défendre comme bon lui semble.

Le mieux pour lui est de préparer le carnet de chèques ....

En France, le commerce des armes est absolument réprouvé par la morale, allons disons : publique. Aussi, un moral-socialiste, dénommé Sapin Deux, a réussi à foutriquer une loi qui porte son nom et dont un commentateur, époustouflé devant la grandeur d'âme de ce Sénèque de sous-préfecture, a dit d'elle :

Elle a principalement pour objectif de mettre en place en France un réel dispositif de lutte contre la corruption, en particulier en obligeant les entreprises, sous peine de sanction financière, à être les acteurs de cette lutte.

Le dispositif réglementaire - déguisé en loi de la République - est en réalité la traduction en Franglais d'une loi américaine passée sous la vertueuse administration du Président Reagan et dénommée Foreign Corrupt Practices Act. Elle est identiquement retranscrite en Grande-Bretagne sous le Criminal Justice Act de 1987 qui a créé son tribunal spécial le Serious Fraud Office (500 fonctionnaires tout de même). La France a donc fait de même avec le "PNF" ou "Parquet National Financier". Les USA ont depuis longtemps ce truc qui s'appelle le "Department of Justice", le plus souvent écrit "DoJ".

La crise de moraline d'Airbus

Quand la loi française a parue, le P-DG d'Airbus a dénoncé son entreprise au PNF pour fraudes dans les marchés de l'armement. Pour faire bonne mesure, du fait que ce "business" est international, il a fait la même chose au DoJ et au SFO. En France, la sanction est 30% du chiffre d'affaires du criminel ou du délinquant je ne sais. Avec un CA annule de l'ordre de 60 milliards, çà fait beaucoup et comme les sanctions du SFO et du DoJ sont certainement au moins supérieures ... l'avenir était ... bizarre.

Selon la presse, Airbus aurait donc réuni ses racketteurs et leur a à peu près tenu ce langage :

Si vous m'attaquez séparément, le premier d'entre vous qui gagnera mangera mon CA et il n'y aura plus rien pour les deux autres en retard. Je risque tout simplement dêtre en faillite ... Par contre, si on discute gentiment entre nous, je peux donner un petit quelque chose à chacun et continuer à pouvoir vous payer des impôts pendant de longues années. Alors ? Un bon mouvement quoi !

Les Raminagrobis internationaux se sont rapidement concertés et ils auraient accepté de recevoir environ 3 milliards d'euros à se partager entre eux. A quel prorata ? Tout le monde s'en fout ...A priori, avec çà, Airbus ne fera pas faillite.

Et après cela, allez raconter que vous préférez La Fontaine à la chronique des affaires commerciales ...


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